Catalogne : les indépendantistes retrouvent leur majorité absolue au Parlement
#Catalogne:Majorité indépendantiste-Participation en forte hausse-Mariano Rajoy (Parti Populaire) désavoué-Le problème politique s’impose à l’UE
Ciudadanos, formation libérale (centre-droit) espagnoliste anti-indépendance est en tête, avec 37 sièges.
Mais les indépendantistes ont retrouvé, ce jeudi 21 novembre, au terme d’une campagne tendue, et grâce à une mobilisation historique, la majorité absolue dont ils disposaient au Parlement de Catalogne, avant la déclaration unilatérale d’indépendance, qui a provoqué leur destitution.
Les trois formations indépendantistes (ERC-CatSi, Ensemble pour la Catalogne, CUP) disposeront, avec 70 sièges au Parlement catalan, de la majorité absolue (fixée à 68).
Participation record
Les Catalans se sont déplacés en nombre pour décider de leur retour au pouvoir ou non. (Campagne “pour ou contre l’indépendance” ). Dès le matin, les files d’attente étaient nombreuses devant les bureaux. A 18 heures, deux heures avant la clôture des bureaux de vote, le taux de participation était déjà de 68,32%, pour atteindre finalement 81,71%. En 2015, lors des dernières élections qui avaient pourtant déjà mobilisé massivement les Catalans, la participation n’avait pas dépassé 75%.
Majorité pour les indépendantistes
Les trois formations indépendantistes, avec 70 sièges au Parlement catalan, disposent de la majorité absolue. Par le jeu des pondérations de voix profitant aux régions rurales, les indépendantistes sont donc majoritaires au Parlement, même s’ils n’ont pas obtenu la majorité des voix : 47,5% des Catalans ont voté pour leurs formations, mais 52,42% contre, à peu près comme en 2015.
Un gouvernement d’union ?
Ils doivent maintenent se mettre d’accord pour former un gouvernement d’union? L’ancien président catalan, Carles Puigdemont, en exil, a formé sa propre liste “Ensemble pour la Catalogne” (Junts per Catalunya). Avec 34 sièges, il est bien placé pour redevenir Président.. Carles Puigdemont devra s’entendre avec Oriol Junqueras, désormais à la tête de la Gauche républicaine (ERC-CatSi), son rival qui, n’est autre que son ancien vice-président, qui, en prison, n’a pu participer pleinement à la campagne
Ces deux formations ont renoncé, dans leur programme, à désobéir à Madrid en déclarant l’indépendance unilatéralement, le parti de la gauche révolutionnaire CUP (Candidatura d’Unitat Popular) exige qant à lui de poursuivre dans cette voie.
Ciudadanos, 1ère force politique
Les électeurs catalans ont désigné comme première force politique de la Catalogne le parti espagnoliste Ciudadanos (centre-droit) libéral anti-indépendance, qui obtient 37 sièges.
Les espagnolistes, opposants à l’indépendance se sont ralliés derrière ce parti qui a profité du discrédit du Parti Populaire et de Mariano Rajoy à droite. Au niveau fédéral espagnol, Ciudadanos forme une coalition gouvernementale avec le Parti Populaire (droite de Mariano Rajoy) et le Parti Socialiste espagnol (qui lors de la lutte clandestine contre le Franquisme était partisan de l’Autodétermination de la Catalogne et du Pays basque). Leur leader en Catalogne est aussi la cheffe de l’opposition au Parlement catalan depuis 2015. Inès Arrimadas, 36 ans. Née en Andalousie, elle s’est présentée comme représentante des centaines de milliers d’Espagnols ayant émigré en Catalogne venus depuis d’autres régions, qui “contribuent à la vie économique de la Catalogne”. Son discours a trouvé de l’écho auprès de 25,36% des électeurs, (passe de 25 sièges à 37 au Parlement catalan).
Podemos, le parti anti-austérité, dont la leader en Catalogne, Ada Colau, est maire de Barcelone (par un jeu large d’alliances, y compris avec les partis indépendantistes) obtient 8 élus. Cette formation est favorable à une évolution institutionnelle dans le cadre espagnol,. La mairesse de Barcelone, opposée à l’indépendance ne s’est pas prononcée contre le Réferendum du 1er Octobre 2017, mais a dénoncé la répression de Madrid..
Mariano Rajoy (Parti Populaire-droite) subit une défaite sanglante, marquant la désapprobation des électeurs envers sa politique à Madrid et surtout sa politique de négation et de répression en Catalogne. Il perd quasiment la moitié de ses voix sortants (avec 4,23 % ) et n’a plus que 3 élus alors qu’il en avait obtenu 11 à la dernière élection !
Le dilemme de l’Union Européenne
L’UE, depuis le déclenchement des évènements en Catalogne (Réferendum déclaré illégal par l’Espagne-1er Octobre 2017) est au mieux restée silencieuse, occultant une situation qui a pris souvent des allures dramatiques, sur fond de répression du pouvoir de droite espagnol, (héritiers du Franquisme) soutenue par le PSOE et le centre-droit espagnol Ciutadanos. Avec ce succès des mouvements et partis ndépendantistes le problème politique ne peut plus dès lors être nié.. L’UE désormais doit s’en saisir à bras le corps
En juin 2015, dans mon ouvrage , “Irlande, Pays basque, Corse: Après l’Adieu aus armes (suite de ma thèse IRA-FLNC, ETA: trois mouvements armés en Europe) J’écrivais notamment ses lignes dans ma conclusion :
“Face à la montée de ces mouvements “sécessionnites régionaux” l’Europe actuelle, l’UE, créée et organisée par des Etats-Nations qui ont étouffé les revendications de ces peuples sans Etats sur leur territoire, ne pourra plus longtemps occulter cette question fondamentale pour son avenir. Et elle devra tôt ou tard redéfinir leur place en son sein, en contraignant d’une part ces Etats-nations “démocratiques” contestés, s’ils ne veulent pas à terme imploser, à engager en leur sein de profondes réformes constitutionnelles (Fédéralisme, Conféderalisme, independances-associations, souverainetés associations..) et d’autre part se réorganiser elle aussi autour de ces territoires “régionaux” à forte identité culturelle, en privilégiant des partenatriats d’association, de complémentarité et de solidarité entre-eux ne dépendant plus des Etats-nations d’aujourd’hui qui la constituent, et qu’elle favorise faisant fi des aspirations légitimes de ces Territoires..
Pierre Poggioli : Docteur en Science politique comparée